Chaire Écologiser, Démocratiser et Territorialiser les industries dans une perspective comparée (ECODETER)

16.10.25

Des programmes d’ajustement structurel dans les pays du Sud Global (Kentikelenis et al, 2016) jusqu’à la libéralisation des marchés au sein de l’Union Européenne (Jegen et Mérand, 2014), les décennies s’étant écoulées des années 1980 à la fin des années 2010 ont été caractérisées comme une ère néolibérale (Crouch, 2013).

Durant cette période, les États se sont essentiellement limités à des rôles de « consolidateur » (Streeck, 2014), facilitateur et régulateur (Mayer et Phillips, 2017).

Cependant, la dernière décennie a été marquée par une série de mesures d’action publique qui semblent indiquer un « retour de l'État » (Vezzoni, 2024) à l’œuvre dans des contextes d'économie politique très différents, au sein des anciens « États développeurs » (Kohli, 2004), des économies coordonnées, libérales et où l’État est fortement interventionniste (Schmidt, 2009).

Politiques publiques récentes : vers un retour de l’intervention étatique

Interdiction de l’export de “minerais critiques” pour la transition écologique en Indonésie et en Malaisie (Tritto, 2025), émergence d’un secrétariat général à la Planification écologique en France (Durand et Keucheyan, 2024), interdiction de l’importation de vêtements et de véhicules de seconde main au Kenya, en Ouganda et au Rwanda (Behuria, 2021; Wolff, 2020), Inflation Reduction Act aux Etats-Unis (Bang, 2024), Green New Deal en Corée du Sud (Green, 2024), expression d’une volonté étatique de s’approprier la valeur extraite du lithium en Argentine, en Bolivie et au Chili (Carrasco, 2024), politiques industrielles vertes en Afrique du Sud et au Brésil (Hochstetler, 2020),la décennie qui vient de s’écouler a été marquée par un ensemble de mesures qui semblent signaler un retour de l’État  dans le domaine de l’action publique liée à la transition écologique et à la lutte contre le changement climatique.

Ces différentes décisions suggèrent en effet d’une part, des formes de divergence vis-à-vis des modes d’intervention de l’État régulateur (Mathieu et Valenzuela, 2024) qui caractérisaient le rôle de l’État durant les décennies précédentes et d’autre part, une réapparition de certains modes d’action « néo mercantiliste » qu’on avait pu observer dans les réponses étatiques aux chocs pétroliers des années 1970 (Thompson, 2017).

Ce retour est dépeint par certains comme le début d’une « ère post-néolibérale » (Nem Singh, 2023) et d’une potentielle émergence d’un « keynésianisme vert » s’exprimant via les interventions étatiques suite à la crise financière de 2008 et à la pandémie de Covid-19 (O’Callaghan et al, 2022). La chaire ECODETER a pour objectif de mettre à l’épreuve la possibilité de cet éventuel retour à partir de travaux comparant plusieurs territoires, au Nord et au Sud et dans plusieurs secteurs d’action publique (énergie, automobile, etc.) afin d’ouvrir une discussion transversale sur les mutations de l’action publique face à la crise climatique.

Une chaire de professeur junior

Portée par Sciences Po Rennes, la chaire de professeur junior ECODETER bénéficie d'un soutien financier de cinq ans alloué par l'Agence Nationale de la Recherche (ANR). Elle est cofinancée par Sciences Po Rennes. 

© Sciences Po Rennes / Pierre Wokuri

Titulaire de la chaire : Pierre Wokuri

Pierre Wokuri est professeur junior en science politique. Entre 2015 et 2023, il a enseigné dans plusieurs établissements : Sciences Po Rennes, l’Université Paris 8, l’Université Bretagne Sud et Sciences Po. Ses recherches associent l’économie politique, la sociologie de l’action publique et les mouvements sociaux.

Il a examiné les relations croisées entre État, marché et mouvements sociaux dans les processus d’exploitation de la nature en s’intéressant à une question principale : comment des ressources naturelles sont-elles exploitées, gouvernées et politisées ?

Il a travaillé en particulier sur les projets coopératifs d’énergie renouvelable en Europe et les activités pétrolières en Ouganda. Les résultats de ses travaux ont notamment été publiés dans la Revue française de sociologie, Lien social et politiques, le Journal of Comparative Policy Analysis: Research and Practice, Politique Européenne, Environmental Politics, la Revue Internationale de Politique Comparée ou Governance Review. Il est également l’auteur d’Une énergie verte et démocratique ? Les projets coopératifs d’énergie renouvelable au Danemark, en France et au Royaume-Uni (Éditions du Bord de l’eau, 2024).

En février 2025, Pierre Wokuri est devenu titulaire de la chaire de professeur junior ECODETER.

Objectifs de la chaire ECODETER

La chaire ECODETER conduit des travaux de recherche, élabore et réalisera des enseignements, construira des ponts entre sciences et société afin de concrétiser :

  • Une recherche comparative Nord/Sud visant à comprendre les trajectoires contrastées des politiques publiques de transition écologique
  • Une contribution au décloisonnement des mondes académiques, artistiques et politiques

Trois axes de recherche

En lien avec le projet de recherche RECOVAL, la chaire ECODETER vise à traiter et approfondir trois axes de recherche :

  • Axe 1 : Action publique et gouvernement des chaînes globales de valeur
  • Axe 2 : Chaînes globales de valeur et “État développeur vert”
  • Axe 3 : Ecologisation des modèles productifs encastrés dans des chaînes globales de valeur