Le 22 mars, au cœur du Festival Nos Futurs, la conférence « Nos Histoires, nos mots, notre pouvoir » a marqué les esprits. Ce moment fort n’était pas seulement une prise de parole : c’était celle de Ludovic Babas, moniteur du Programme d’Études Intégrées (PEI) de Sciences Po Rennes, et Ikrame Mokdad, ancienne bénéficiaire de ce même programme, aujourd’hui étudiante à Sciences Po Saint-Germain-en-Laye.
Sur scène, deux trajectoires liées par un même dispositif de démocratisation, deux récits rendus possibles par l’engagement, la transmission et la confiance. Le PEI a donné naissance à ces voix. Nos Futurs leur a offert un espace pour transformer l’intime en force politique.

Le PEI de Sciences Po Rennes, une fabrique de récits puissants
Aujourd’hui en cinquième année à Sciences Po Rennes, Ludovic Babas a été l’un des visages engagés du Programme d’Études Intégrées (PEI) : d’abord tuteur en 2021, puis moniteur 2023-2025. Ce programme de démocratisation vise à réduire les inégalités d’accès aux grandes écoles en accompagnant des lycéennes et des lycéens souvent éloignés du monde de l’enseignement supérieur, en leur transmettant des méthodes de travail, en stimulant leur confiance et une confiance plus grande d’eux-mêmes.
« Au cours de discussions, plusieurs anciens bénéficiaires du Programme de démocratisation de Sciences Po Rennes m’ont souvent dit : “Le PEI ne m’a pas seulement préparé à un concours. Il m’a préparé à transmettre et à croire en moi”. Et c’est bien là que je vois que c’est bien plus qu’un programme.»
C’est justement dans ce cadre qu’il rencontre Ikrame Mokdad, alors lycéenne. Comme beaucoup, elle pense que Sciences Po est une école élitiste, inaccessible, réservée à une minorité. Mais une professeure la pousse à candidater au PEI. Elle est sélectionnée, découvre un accompagnement rigoureux, des méthodes, des échanges, et surtout : une confiance nouvelle.
Elle participe ensuite au séjour Mon Projet / Notre République à Paris, organisé à l’occasion des 10 ans du PEI dans le réseau ScPo en février 2024. Un moment fondateur, marqué par une phrase du vice-président du Sénat :
« Aucun poste que peut offrir la République ne vous est interdit. »
Aujourd’hui, Ikrame est étudiante en première année à Sciences Po Saint-Germain-en-Laye. Et à Nos Futurs 2025, elle n’est plus une simple bénéficiaire : elle est devenue l’incarnation de ce que le PEI rend possible. Sur scène, elle raconte son parcours, son changement de regard, son ascension, ses combats, ses réussites.
À elle seule, elle prouve que la démocratisation n’est pas qu’un principe : c’est une dynamique concrète qui révèle des talents, et forme des voix capables de transformer leur histoire en levier collectif.
« Le PEI a compensé mon manque d’informations, m’a donné des repères, et surtout, m’a transmis des outils que je mobilise aujourd’hui encore dans mes études. »
Faire exister des récits dans l’espace public
La conférence « Nos Histoires, nos mots, notre pouvoir » a constitué un moment profondément politique – au sens noble du terme : celui qui redonne voix et visibilité à des récits trop longtemps écartés de l’espace public.
« Très souvent, les récits que l’on entend sur nous sont construits autour du déterminisme. Mais cette fois, c’était nos histoires, nos mots, notre pouvoir. À nous d’incarner les transformations sociales que nous voulons voir naître, pour nous et par nous-mêmes »
Dans ce cadre, la parole ne se limite pas à un exercice rhétorique. Elle devient un outil de réparation et de mobilisation, capable de soigner les blessures du silence, de reconstruire l’estime de soi, et d’ouvrir des espaces pour penser autrement. L’art oratoire, tel qu’il est ici investi, permet de reprendre sa place, d’affirmer son droit à être entendu, et de créer des ponts entre l’expérience vécue et les grands enjeux collectifs.
C’est en cela que cette conférence illustre la portée du Programme d’Études Intégrées (PEI). Bien au-delà de la préparation à des études exigeantes, le PEI offre à des jeunes un cadre pour prendre conscience de leur potentiel, affûter leur pensée, et s’engager dans des luttes essentielles pour une vraie méritocratie. À travers ce dispositif, des jeunes qui doutaient parfois de leur légitimité à s’exprimer développent une parole forte, ancrée dans leur réalité, et tournée vers leur avenir.

Une parole qui libère, relie et transforme
Ikrame et Ludovic ont prouvé une chose essentielle : quand les dispositifs de démocratisation sont pensés avec ambition, ils donnent naissance à des voix puissantes, capables de transformer les normes et d’ouvrir la voie à d’autres.
Ce ne sont plus seulement des parcours individuels. Ce sont des récits collectifs, des graines semées grâce au PEI, qui aujourd’hui prennent racine dans l’espace public.